Cette triste histoire nous est relatée dans le très intéressant livre Histoire de Paris depuis son origine de 1853.
La place du Trône – actuelle place de la Nation – est rebaptisée le 10 août 1792 Place du Trône Renversé. A cette date, la guillotine a déjà bien fonctionné.
« Avec ma machine, je vous fais sauter la tête en un clin d’œil, et vous ne souffrez point. La mécanique tombe comme la foudre, la tête vole, le sang jaillit, l’homme n’est plus. ». C’est ainsi que son inventeur, Jean Ignace Guillotin, en a vendu l’idée à l’Assemblée qui déclare le 3 juin 1791 : “Tout condamné à mort aura la tête tranchée”. C’est la fin des mises à mort différenciées selon le crime ou le statut social du condamné.
Entre 13.000 et 17.000 têtes tomberont pendant la Révolution. (Si vous voulez savoir si un de vos ancêtres est mort sous le couperet de la “Louison”, vous pourrez lors d’une visite de la Conciergerie en consulter la liste).
Pour plus de discrétion – les parisiens commençant à se lasser de ces exécutions – , on déplace la guillotine place du Trône Renversé qui n’est encore qu’un terrain vague. L’engin est installé dans la partie sud plus ombragée près du pavillon de droite construit par Ledoux le 13 juin 1794.
Les décapitations iront bon train puisque plus de 1300 personnes seront guillotinées sur cette place – soit une moyenne de 30 par jour – avant de rejoindre les fosses communes du cimetière Picpus tout proche.
Justement, le jour qui nous occupe, les charrettes attendent devant la porte de la Conciergerie. Elles doivent conduire 54 condamnés à l’échafaud.
Les gardiens procèdent à l’appel. Mais que s’est-il passé dans la tête de ce jeune paysan de Montreuil qui devait être traduit en police correctionnelle pour escroquerie, pour qu’il réponde à l’appel d’un nom qui n’est pas le sien ? On le saura jamais.
Certes il avait fait le désespoir de ses parents pour des actes qu’il avait du mal à réprimer et qui le vouait probablement à une existence fatalement criminelle. Mais quand même !
On procède au décompte. Le compte y est et le convoi s’ébranle pour un dernier voyage dans les rues bondées de la capitale.
En traversant le faubourg Saint Antoine, le jeune homme reconnait dans la foule deux paysannes qui sont des amies de sa famille. Il leur crie : ” Dites donc, les autres, vous direz à papa et à maman que je vas me faire raccourcir, il y a assez longtemps que je leur donne du chagrin; j’ai trouvé l’occasion de mourir en compagnie d’honnêtes gens, j’en profite, on pouvait plus mal finir. Adieu, bon jour à papa et à maman, surtout ne l’oubliez pas. Adieu, adieu! ».
On raconte qu’Il monta gaiement sur l’estrade de l’échafaud, criant ‘Vive la République, je m’en fous …” et se coucha lui-même sur la planche….