Les bouquinistes

You are currently viewing Les bouquinistes

Ils font partie du paysage de la capitale. Les bouquinistes des quais de Seine sont à Paris ce que sont les gondoles à Venise.
Au nombre de 200, ils offrent aux parisiens et aux touristes la plus grande librairie à ciel ouvert du monde.
Leurs célèbres boites couleur vert wagon s’étendent sur les deux côtés de la Seine Rive droite du pont Marie au pont des Arts et Rive Gauche du pont Sully au pont Royal.

> Colporteurs et estaleurs

Retour sur leurs origines et sur une profession très encadrée par la Ville de Paris.
Le terme de “bouquiniste” apparait la première fois dans le Dictionnaire de l’Académie Française en 1762 : « Celui qui vend ou achète de vieux livres, des bouquins ». L’origine du mot bouquin viendrait du flamand “boeckijn” (petit livre).
Le Pont Neuf construit à la fin du XVIe siècle a été le premier pont de Paris sans maisons et doté de trottoirs. Il devint très vite un lieu de rassemblement pour les parisiens. Tous viennent écouter les camelots ou autres charlatans, tondeurs de chiens ou arracheurs de dents.
Parmi eux des marchands colporteurs vendent leurs livres dans un panier porté en bandoulière. Les “estaleurs“, quant à eux présentent les livres sur des tréteaux ou à même le sol.
Mais ces ancêtres de nos bouquinistes sont mal vus par les libraires locaux qui vont obtenir leur interdiction en 1619. Le pouvoir, lui aussi voit d’un mauvais œil ces ventes ambulantes qui échappent à la censure.
C’est pendant la Révolution que la profession prospère car alors que ne doivent circuler que les journaux révolutionnaires, les bouquinistes récupèrent les réquisitions et les pillages des bibliothèques de l’aristocratie et du clergé.
Sous Napoléon, ils s’installent sur les quais de Seine et obtiennent le même statut que les commerçants publics de la Ville de Paris. En 1859 un premier règlement met en place des concessions fixes. Chaque bouquiniste a droit à 10 mètres de parapet mais il doit remiser sa petite caisse lorsqu’il ferme boutique au coucher du soleil.
En 1891, la ville les autorisera à laisser leurs livres la nuit sur place.

> Les bouquinistes résistent au baron Haussmann

En 1886, les bouquinistes s’opposent au Baron Haussmann qui souhaite les voir disparaitre des quais de Seine. Sous la pression populaire auprès de Napoléon III, le Baron renoncera finalement à son projet.
En 1900, les bouquinistes sont au nombre 200 et ils adoptent la couleur du vert wagon pour leurs boites à l’image des fontaines Wallace et du tout nouveau métro parisien.
En 1930, les dimensions des boîtes sont règlementées : longueur : 2 m, profondeur : 0,75m, hauteur côté Seine : 0,6m, hauteur côté quai : 0,35m. En période d’utilisation, la ligne d’horizon, figurée par le bord supérieur du couvercle relevé ne devra pas s’établir à plus de 2,10 m au-dessus du sol. L’ouverture du couvercle doit être suffisamment sécurisée pour résister aux bourrasques de vent qui soufflent sur les quais de Seine. Dans tous les cas, l’installation de boîtes, coffres et auvent ne devra être scellée ni causer quelque détérioration que ce soit au parapet.

> Bouquiniste, une profession très encadrée

Aujourd’hui, la Mairie de Paris encadre la profession avec un cahier des charges strict et procède régulièrement à des appels à candidature pour attribuer les espaces rendus vacants, notamment par les départs en retraite des bouquinistes. Si aucun diplôme particulier n’est exigé, le dossier du candidat doit démontrer la motivation du postulant et détailler les produits vendus et ses circuits d’approvisionnement. En 2023, 42 candidats se sont présentés pour 17 espaces vacants.

Chaque bouquiniste doit acheter les 4 boîtes de son emplacement et procéder à leur entretien. Il doit être présent 4 jours par semaine sauf en cas d’intempérie. En contrepartie il ne paye aucun loyer à la Mairie de Paris. Une seule boîte peut présenter des bibelots et gadgets autres que livres, affiches et gravures. La mairie veille particulièrement au respect de cette clause.

Lorsque vous déambulerez sur les quais, vous pourrez remarquer que certains bouquinistes sont spécialisés dans des domaines particuliers tels que les livres d’art, les romans noirs policiers ou les bandes dessinées. On évalue à plus de 300 000 livres dont de nombreux exemplaires introuvables en librairie le contenu de l’ensemble des boîtes vertes, ainsi qu’un grand nombre d’estampes, revues, cartes de collection.
La profession s’est dotée d’un site internet qui permet de présenter les articles et d’entrer en contact avec le bouquiniste concerné.

On ne peut terminer cet article sans mentionner le litige qui oppose les bouquinistes à la Préfecture de Police de Paris qui souhaite les expulser pour la cérémonie d’ouverture des prochains jeux olympiques de Paris. Une pétition est en ligne et a déjà recueilli de nombreuses signatures obligeant la Préfecture à engager des discussions.

 

Laisser un commentaire