Nous nous sommes quittés en 1792 juste après le vol des Joyaux de la Couronne de France au Garde Meubles (voir notre article).
Si une partie des pierres précieuses a été récupérée dont le précieux “Régent” d’autres pièces prestigieuses ont disparu entre les mains des voleurs et des receleurs.
Parmi ces joyaux volatilisés, nous avions évoqué le Diamant Bleu ou Diamant Bleu de France ou encore Diamant Tavernier du nom de celui qui l’a rapporté d’Inde en 1668, Jean Baptiste Tavernier.
Louis XIV se porte acquéreur du diamant pour une somme qui représente 147 kg d’or pur et le fait retailler par le joaillier de la Cour, Jean Pittan.
Jean-Baptiste Tavernier se plaisait à raconter qu’avant qu’il fasse l’acquisition du diamant un esclave ayant dérobé la pierre sur une statue avait été foudroyé en sortant du temple. Cette légende de malédiction associée au diamant bleu était selon lui destinée à dissuader les voleurs mais elle restera associée au Diamant Bleu. On va effectivement relever plusieurs destins tragiques chez ceux qui ont possédé le fameux diamant bleu.
Lorsque Tavernier vend la pierre au Roi, elle fait 115,16 carats métriques modernes (poids brut, avant taille). Il s’agit à l’époque du plus gros diamant bleu jamais découvert dans le monde. Pittan met deux années pour concevoir le dessin de la taille et deux autres années pour exécuter le travail. Cette taille fut facturée 1/10 du prix d’achat.
Le diamant retaillé pèse 69 carats. Le résultat est de l’avis général un chef d’œuvre. La pierre comprend 72 facettes et une symétrie d’ordre impaire.
Mais le plus surprenant qui sera dévoilé par François Fagès lors de ses recherches sur le joyau, c’est le reflet de la parure en or qui ornait le dos de la pierre au travers du diamant grâce à la finesse de la taille du joaillier. Un soleil en or se dessine dans le diamant quand on le regarde de face. Tout le symbole de Louis XIV.
La pierre sera sertie sur une broche que le Roi portera à son foulard. En 1749, le Roi est fait chevalier de l’Ordre de la Toison d’or. Il demandera alors au joaillier Pierre-André Jacquemin de l’inclure dans l’insigne de la Toison d’Or.
> Le diamant Hope
Vingt ans et deux jours après le vol, le 19 septembre 1812, un diamant bleu de 45,5 carats et de forme ovale apparaît outre-Manche. C’est un négociant de diamants londonien, un certain Daniel Eliason et un lapidaire londonien, John Francillon qui décrivent un diamant bleu de 45,5 carats et de forme ovale.
Le doute s’installe. Ne serait-ce pas le Diamant volé en 1792 ?
Vingt ans, c’est la durée de prescription du vol mais pour le recel, la durée est plus longue et les premières hypothèses laissent à penser qu’il s’agit bien du diamant bleu et que la pierre a été retaillée.
Le premier propriétaire reconnu sera un milliardaire excentrique, Thomas Hope. Il gardera le diamant qui porte désormais son nom jusqu’en 1909. La pierre passe ensuite entre plusieurs mains dont la famille Cartier et c’est Harry Winston qui l’achète en 1949 pour en faire finalement don en 1958 au Smithsonian Institute de Washington.
Surprenant; on raconte que Winston envoya le diamant au musée par la Poste.
Le diamant est désormais exposé au National Museum of Natural History de Washington.
C’est l’objet d’art le plus visité après la Joconde.
> Du doute à la certitude
Plusieurs joailliers ou chercheurs tentent d’éclaircir le mystère mais c’est une découverte récente qui va lever le doute le 8 décembre 2007.
Lors d’une opération de rangement dans les réserves du Museum d’Histoire Naturelle, le Professeur de minéralogie François Fages et son assistant découvrent une boîte qui renferme un moulage en plomb. Il s’agit de ces moulages que font les joailliers pour garder trace de leur réalisation ou pour présenter au client la taille envisagée.
La face arrière du plomb présente une corolle de 7 pétales caractéristique de la taille en « rose de Paris » du diamant bleu de Tavernier. François Farges veut en avoir le cœur net et poursuit ses recherches pour finalement découvrir dans les collections minéralogiques l’étiquette originale du moulage. Celui-ci a été donné vers 1850 par un joaillier parisien, Charles Achard. Il y est inscrit : « Mr Hoppe de Londres » .
Le diamant Hope a donc bien été retaillé dans le diamant bleu volé sous la Révolution.
Grâce aux techniques actuelles, aux calculs de l’équipe de François Fagès et des équipes du musée américain, avec l’aide d’un artiste lapidaire New Yorkais, John Hatleberg, les pierres ont pu être reconstituées au 3 stades : la pierre telle que l’avait rapportée Tavernier, le diamant bleu retaillé pour Louis XIV et le diamant Hope.
Pour ceux qui veulent plus d’informations, je vous invite à suivre cette conférence passionnante du Museum d’Histoire Naturelle avec le Professeur François Fages. Elle vous décrira les travaux de comparaison et de reconstitution du diamant bleu de l’époque de Louis XIV réalisés par l’équipe du Professeur Fages.