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Lorsqu’on évoque les expositions Universelles de 1899 et 1900, on pense immédiatement à l’inauguration de la Tour Eiffel ou de la première ligne de métro. Mais en 1900, une attraction attira de nombreux Parisiens. Baptisée “La rue de l’Avenir”, il s’agissait d’un trottoir roulant qui parcourait une boucle de 3,5 kilomètres au milieu des bâtiments de l’Exposition Universelle.
Pour 50 centimes de l’époque (environ 1 euro 20) vous étiez parti pour une boucle de 26 minutes.
Cette attraction avait été conçue par deux américains, inventeurs du trottoir roulant, qui l’avaient déjà installée lors de l’Exposition Universelle de 1893 à Chicago.

> Un trottoir roulant électrique qui file à 8 kilomètres par heure

Il faut imaginer un véritable circuit autour du site de l’exposition, avec neuf stations. Il était installé sur un viaduc en bois, à 7 mètres au-dessus du sol.

Le trottoir allait dans le sens inverse des aiguilles d’une montre selon le parcours suivant : esplanade des Invalides, quai d’Orsay (« quai des Nations », le long de la Seine), Champ-de-Mars (le long de l’avenue de La Bourdonnais), avenue de La Motte-Picquet, rue Fabert, pour revenir aux Invalides.
Il circulait en sens inverse de la ligne de chemin de fer électrique exploitée par la Société Decauville installée lors de l’exposition de l’année d’avant. La ligne a deux tunnels, l’un de 20 m, sous le carrefour du pont de l’Alma, l’autre de 106 m, sous le terre-plein devant le pont d’Iéna et fait une halte à la gare de la Tour Eiffel. Le train file à la vitesse de 15 km/h.

Mais revenons à notre trottoir roulant. La plate-forme mobile pouvait recevoir simultanément 14 000 personnes.
La Revue scientifique, dans un article intitulé « Les trottoirs roulants de l’Exposition », nous signale que durant l’après-midi du jour de Pâques 1900, elle a transporté 70 000 personnes. Il nous en explique son fonctionnement, mais avant de voir ces aspects techniques, écoutons le journaliste du Le Petit Français illustré du 21 juillet 1900 qui nous parle de l’Exposition Universelle :

” Vous comprenez bien que des choses intéressantes ou curieuses, disséminées sur une pareille longueur, demandent à être reliées par des moyens de communication rapide, permettant de passer sans fatigue d’une à l’autre.
Ces moyens existent, et l’un d’eux, au moins, constitue pour Paris une nouveauté qui a le plus grand succès auprès des curieux : c’est le trottoir roulant. Supposez que, sortant d’une maison quelconque, vous posez le pied sur le trottoir et que celui-ci se mette à marcher en vous emportant avec lui, les maisons restant bien entendu, en place, vous aurez une représentation exacte de ce qu’est le trottoir roulant de l’Exposition.
Vous trouvez devant vous trois planchers : l’un qui est fixe; le second un peu plus élevé que le premier et sur lequel, il est facile de monter sans risquer une chute ; enfin le troisième, encore plus élevé que le deuxième et qui se déplace avec une vitesse de 8 kilomètres à l’heure. Il est donc très simple de passer du deuxième trottoir sur le troisième, puisque la différence des deux vitesses n’est que de 4 kilomètres à l’heure.
Le passage d’un trottoir à l’autre est d’ailleurs facilité par la présence de solides tiges de fer verticales, fixées aux planchers mobiles et auxquelles les personnes qui ne se sentent pas le pied assez sûr pour pouvoir se passer de point d’appui, doivent s’accrocher afin d’éviter une rupture d’équilibre, sans doute peu dangereuse, mais qui aurait pour conséquence de provoquer immédiatement l’hilarité des personnes qui ont déjà franchi le pas d’une façon plus ou moins gracieuse et qui sont installées sur la plate-forme mobile.
Le trottoir roulant est une excellente école de psychologie et de morale ; car les personnes qui, victimes de cette petite mésaventure, se fâchent et s’en prennent aux rieurs de leur maladresse, accusent par là un mauvais caractère. D’ailleurs, dans ce cas, les rires redoublent et le personnage grincheux reçoit ainsi une petite leçon, dont, s’il est sage, il ne manquer pas de tirer profit pour une autre fois.”

Vous savez combien le dessin est important dans la presse de l’époque. Il est clair qu’une telle attraction fait causer, écrire et dessiner. Va-t-on désormais voir cette incroyable moyen de transport envahir les rues de Paris ?

> Parlons un peu technique

L’originalité du système réside dans ce fait que les organes de propulsion sont absolument distincts des organes de soutien et de roulement.
La partie mobile du trottoir est munie de deux paires de roues portées et guidées par des rails latéraux établis sous les planchers.

La propulsion est assurée par un galet agissant par friction sur une poutre fixée sur la ligne médiane de chaque trottoir.
On compte 150 moteurs sur l’ensemble du parcours.
Le galet destiné à propulser la plateforme à grande vitesse à un diamètre double de celui destiné au trottoir le plus lent. Le premier trottoir qui se déplace à la vitesse de 4 km/h a une largeur de 0,90 m, le second qui circule deux fois plus vite possède une largeur de 2 m.
L’électricité nécessaire à la production du mouvement est fournie par l’usine des Moulineaux, de la Compagnie de l’Ouest.

> Le précurseur du TRR, le Trottoir Roulant Rapide

Aujourd’hui les escaliers roulants font partie de notre vie. Et il ne faut pas oublier de tenir sa droite sinon on se fait vilipender ou bousculer.
Dans les grandes stations, des trottoirs roulants permettent désormais de parcourir les longs couloirs.
Descendant de l’attraction de l’Exposition Universel, le trottoir roulant rapide (TRR) a été un tapis roulant expérimental construit par la société « Constructions industrielles de la Méditerranée » (CNIM) et installé en 2002 à la station Montparnasse – Bienvenüe.
Le TRR fonctionna d’abord à la vitesse de 11 km/h (3 m/s), mais en raison de fréquentes chutes de voyageurs et de divers accidents, la vitesse fut réduite à 9 km/h (2,5 m/s), qui demeure beaucoup plus rapide que celle des autres trottoirs roulants, qui est d’environ 4 km/h.
Il a été démonté en septembre 2009 du fait d’une trop faible disponibilité pour être remplacé par un tapis roulant classique en mars 2011.

“La rue de l’Avenir” avec ses 8 km/h (8,5 km/h même selon le document de l’INA) reste donc bien plus qu’une attraction.