La restauration en cours de Notre Dame de Paris fait l’objet de nombreux articles et nous attendons tous avec impatience sa réouverture en décembre prochain. Il est évident que les visiteurs en prendront plein les yeux.
C’est le 100ème article de ce blog et nous allons vous narrer la légende du serrurier Biscornet que l’on raconte depuis plus de 700 ans sur le Parvis de Notre Dame.
Le Petit Journal, dans son édition du 23 août 1867 nous en dit plus.
La cathédrale fait alors l’objet de travaux de restauration menés par Viollet-le-Duc et le journal évoque la repose de la porte centrale de l’édifice, porte désormais dotée de pentures et serrures en fer forgé.
Mais remontons le temps à l’époque du serrurier Biscornet.
> Le pacte avec le Diable
Au douzième et treizième siècles vivait un ouvrier très maladroit qui allait d’atelier en atelier sans jamais atteindre la maîtrise de son métier.
Un jour, il fabriquait des ancres marines dans un port mais il avait d’importantes difficultés pour réussir la soudure de ces immenses pièces et était la risée de ses camarades.
Le pauvre homme pleurait au fond de son atelier lorsqu’un homme habillé de rouge apparut et lui demanda pourquoi il était si triste.
– “Rassure toi, nous allons souder ton ancre“, lui dit-il
L’ouvrier leva la marteau mais la force lui manqua. L’homme en rouge frappa alors du poing sur l’enclume et l’ancre fut soudée.
– “Je suis le Diable. Si tu veux faire un pacte avec moi, tu seras le plus habile des serruriers et tu pourras entreprendre tous les ouvrages que tu voudras.”
Sans attendre la réponse de l’ouvrier, il disparut, laissant au serrurier deux pièces d’or. Ce dernier rejoignit alors ses camarades au cabaret et ceux ci virent qu’il avait désormais deux petites cornes. D’où le surnom qu’ils lui donnèrent : “Biscornet“.
Peu de temps après, le serrurier, devenu très habile, fut chargé de la ferronnerie des deux portes latérales de Notre Dame. Devant l’ampleur de la tâche, Biscornet se découragea mais le Diable réapparut et le lendemain matin toutes les pentures étaient posées.
Seule la porte du milieu resta sans ferrures car la porte étant en face du Saint Sacrement, le Diable ne voulut pas s’en charger.
Le Pacte prévoyant que Biscornet donnerait son premier fils au Diable, le serrurier ne voulut pas se marier. Le Diable se lassa et entraina Biscornet dans les airs.
Le serrurier, implorant Dieu de le pardonner de sa faute s’accrocha à une croix du clocher d’une abbaye. Le Diable perdant un peu de force le lâche. Biscornet tomba alors au milieu des moines de l’abbaye. Il y restera jusqu’à sa mort.
On raconte que le Diable se vengea et empêcha que les portes de Notre Dame s’ouvrent. Heureusement, les prêtres arrivèrent à les ouvrir en aspergeant les serrures d’eau bénite.
> Le serrurier de Viollet-Le-Duc
Trente avant la restauration de Notre Dame par Viollet-Le-Duc, et l’article du Petit Journal, un jeune apprenti serrurier, Pierre-François Boulanger, apprend par son père la légende de Biscornet. Il s’échappe de l’atelier, va observer les portes et revient dire à son père :
– “Mon père, le diable n’est pour rien dans la fabrication des portes de Notre Dame !
– Qu’est ce que cela signifie, petit malheureux ?
– Cela signifie que je reviens de Notre Dame, j’ai touché les serrures et je sais comment elles sont faites !”
Comme réponse, le jeune apprenti reçoit une paire de claques.
Trente ans plus tard, il est chargé de l’énorme travail de restauration qui l’occupera pendant douze ans. Boulanger s’est tellement rendu maître de son travail qu’il est difficile d’en voir les soudures.
L’ensemble des serrures comprend en tout 10 pièces. Chaque penture pèse entre 160 et 180 kg. Chaque panneau en compte 30 à 40, ce qui porte le tout à 1.500 kg. 5.000 clous seront utilisés.
Pour montrer que ce nouveau travail n’est pas l’œuvre du Diable, un panneau précise :
« Ces ferrures ont été faites par Pierre-François Boulanger, serrurier, posées en août 1867, Napoléon III régnant, E. Viollet-le-Duc, architecte de Notre-Dame de Paris »
Pierre-François Boulanger repose depuis 1891 au cimetière du Montparnasse : il a laissé derrière lui d’incroyables pentures dans toute la France.