Chasseurs de rats

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Il faut voir la tête des passants lorsqu’ils découvrent la devanture de la boutique Aurouze, dératiseur au 8, rue des Halles. Il faut dire que depuis 150 ans, de père en fils, ici on trucide en professionnel. En témoignent les 20 spécimens de 500 g qui pendent dans la vitrine capturés aux Halles en 1925. L’arrière grand-père, Etienne, créateur de la Société en 1872, artificier et passionné par les pièges n’a-t-il pas inventé la tapette à souris et à rats !
Il faut dire que la cohabitation du rat et du parisien ne date pas d’hier.
Un excellent livre Les rats sont entrés dans Paris d’Olivier Thomas aux éditions Vendémiaire nous apprend plein d’anecdotes au sujet de ce rongeur qui suscite dégout et fantasme.
Avant la création des égouts, des hordes de rats pullulaient dans le quartier de Montfaucon qui recueillait tous les excréments des parisiens et les résidus d’équarrissage. On y entreposait aussi les animaux morts. Rattus norvegicus était aussi bien présent au marché des Innocents, près de la Halle aux grains et près des abattoirs installés en périphérie de Paris.
Olivier Thomas cite le cas de l‘éléphant de la Bastille. Cette sculpture en plâtre avait été installée à la demande de Napoléon en prévision d’une future statue-fontaine en bronze qui ne sera jamais réalisée. La maquette grandeur nature devint un repère à rats qui nécessita sa destruction en 1814. Au premier coup de pioche plus de 200 rats seront tués.
Mais les rongeurs ont aussi leurs heures de gloire : aux Folies Bergères, on fait grimper 200 rats dans un train miniature avec aiguilleurs, chefs de gare et porteurs de valises. A Montfaucon, on assiste à des combats de rongeurs et de chiens. Près de la barrière de Montparnasse, on pouvait s’entrainer aux fléchettes sur des rats attachés sur des planchettes.
Au XIXeme siècle, chasser le rat est devenu rentable : vous pouviez rapporter la queue de l’animal à l’Hôtel de Ville pour toucher une prime. Les peaux sont même vendues 10 centimes pour faire des gants recherchés par les dandys et les ladys de Londres.
Le combat contre les rats est toujours d’actualité. On dit qu’il y a deux rats par habitant dans Paris. La multiplication des fast-food et l’habitude qu’ont pris les touristes et les parisiens de manger dans les parcs en y laissant des déchets ont fait sortir les rats des égouts.
A l’époque d’Emile Aurouze, les rongeurs sortaient le soir pour glaner des restes dans les pavillons des Halles, aujourd’hui il n’est pas rare de les voir même en plein jour arpenter les parcs de la ville. Pensez y, les poubelles sont nombreuses et les affiches “Stop aux rats” vous invitent à moins d’incivilités.

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